Formation Manager créativitéComme toute entreprise, vous disposez sans doute de collaborateurs que l’on qualifie de « créatifs ». Et sans doute se montrent-ils tour à tour lunatiques, imprévisibles, excentriques ou encore arrogants. Impossible pourtant de se passer d’eux ! Car vous êtes contraints d’innover pour vous développer. Vous devez donc apprendre à tirer d’eux le meilleur.

On remarque que si la plupart des entreprises affichent des ambitions réelles dans le domaine de l’innovation, très peu font les efforts nécessaires pour contenter et motiver ceux qui sont à même de l’insuffler. Le bridage de la créativité reste en effet un problème très fréquent dans les organisations.

Voici donc quelques conseils pour favoriser l’implication et l’efficacité de vos créatifs.

1. Choyez-les et laissez-les se tromper

A la manière des parents qui favorisent l’apprentissage de leurs enfants au travers de leurs erreurs, soutenez et encouragez vos éléments les plus créatifs en leur laissant expérimenter des choses absurdes, quitte à ce qu’ils échouent. Ce n’est pas grave. L’innovation nait de l’incertitude, du risque et de la tentative. Si vous savez qu’une expérience va marcher, on ne peut pas la considérer comme « créative ». Le rôle du créatif est justement d’imaginer et de tester ses idées, laissez-le donc s’amuser avec ses inventions !

Bien entendu, ce temps d’expérimentation représente un coût pour l’entreprise, mais celui-ci est bien moindre que le coût que représenterait l’absence d’innovation.

2. Entourez-les de personnes stables

Le pire qui puisse arriver à un créatif serait d’être obligé de travailler avec quelqu’un qui lui ressemble. Tous les deux se retrouveraient en situation de rivalité, auraient tendance à s’enliser dans des brainstormings interminables ou s’ignoreraient tout simplement. Ceci dit, vous ne pouvez pas non plus leur imposer des gens conventionnels et ennuyeux. Ils ne se comprendraient pas et finiraient par se brouiller.

Une étude récente montre que les équipes constituées de membres aux profils divers, mais ouverts aux points de vue des autres, sont plus performantes et inventives.

La solution est donc d’associer vos créatifs à des équipiers assez conventionnels pour ne pas remettre en cause leurs idées, mais suffisamment peu conventionnels pour accepter de collaborer avec ces individus à l’imagination débordante ! Ces équipiers chapotent la bonne exécution des idées, se chargent du « sale boulot » et sont attentifs aux détails. Prenez l’exemple des grandes équipes de football actuelles : à Barcelone, Messi a besoin de Busquets et de Puyol ; à Madrid, Ronaldo a besoin d’Alonso et de Ramos.

3. Ne leur confiez que des missions qui ont du sens

D’après une étude récente, les créatifs instinctifs sont porteurs d’une vision plus globale des choses (ils voient la bigger picture). Ils saisissent davantage les enjeux, même s’ils n’arrivent pas à expliquer pourquoi. Cette qualité a pourtant un revers : un créatif ne voudra pas se lancer dans un projet dépourvu de sens.

Cette approche « tout-ou-rien » provient de troubles bipolaires fréquents chez l’artiste-créateur, qui ne parvient à travailler que lorsqu’il a trouvé l’inspiration. Et cette inspiration émane du sens qu’il trouve dans la mission qui lui est confiée. Du reste, cette règle peut s’appliquer à d’autres collaborateurs : c’est l’intérêt de la tâche allié à une curiosité d’esprit qui donne l’étincelle de la créativité.

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Comme l’a dit John Irving, célèbre écrivain américain,

la raison pour laquelle je parviens à travailler autant à l’écriture de mes ouvrages, c’est que je n’ai pas l’impression de travailler.

D’un autre côté, il reste toujours des collaborateurs dans l’entreprise qui ne considèrent pas leur travail comme étant une source possible d’épanouissement et qui se contentent de pointer matin et soir. Ils sont principalement mués par des motifs externes à leur tâche, tels que la rémunération. Ces personnes-là se voient en général assignées aux tâches peu intéressantes, voire ingrates.

4. Ne leur mettez pas la pression

Le degré de créativité d’un individu dépend souvent de la marge de manœuvre qu’on lui accorde. Un créatif a besoin de liberté et de souplesse pour développer son talent. Il n’aime guère l’ordre établi et le prévisible, mais se sent au contraire très à l’aise dans un univers libéré de toute contrainte. Il évolue dans la spontanéité.

Ainsi, ne le forcez pas à rentrer dans le moule ! Laissez-le travailler à domicile, aux heures qui lui conviennent. Ne lui demandez pas où il est, ce qu’il fait ou comment il s’y prend. Voyez le personnage de Don Draper dans la série Mad Men, Directeur Créatif d’une grande agence de publicité : ses supérieurs lui laissent toute latitude pour organiser son travail comme il l’entend. De cette manière, il n’a jamais claqué la porte pour partir chez un concurrent.

5. Ne les payez pas trop

La relation entre la motivation intrinsèque (exemple : réel intérêt pour la tâche elle-même) et la motivation extrinsèque (exemple : attente d’une gratification externe) fait l’objet d’un débat depuis fort longtemps. Au cours de ces 20 dernières années, les psychologues ont démontré la réalité de l’effet dit de « sur-justification », processus par lequel une récompense trop élevée diminue proportionnellement l’intérêt authentique pour la tâche. Ce désintérêt a bien sûr des conséquences directes sur la qualité du travail accompli.

Deux synthèses compilant les résultats de plus d’une centaine d’études sur le sujet ont démontré l’impact négatif d’une récompense extrinsèque sur l’implication des individus. En effet, lorsqu’on confie une tâche intrinsèquement intéressante à un individu sans autre forme de récompense, son implication dans sa tâche est forte. Dès lors que, ceretis paribus, l’on introduit une récompense extérieure (argent, forte reconnaissance, compliments,…), son implication baisse d’autant. On constate toutefois qu’un feedback positif voire très positif n’affecte pas la motivation intrinsèque, à condition qu’il soit sincère. Et ce constat est identique chez les adultes et les enfants.

Bref, plus vous paierez quelqu’un pour faire ce qu’il aime et moins il y prendra de plaisir. Selon Mihály Czikszentmihalyi, « la qualité essentielle et la plus largement répandue chez les personnes créatives s’avère être leur capacité à créer pour le plaisir de créer. » Ainsi, ceux qui possèdent un réel talent pour l’innovation ne sont pas mués par la quête d’enrichissement financier. Une étude menée auprès de plus de 50 000 managers répartis sur une vingtaine de pays différents a permis de montrer sans équivoque que les individus les plus imaginatifs et curieux sont souvent motivés par le désir de reconnaissance et par une curiosité intellectuelle pure et désintéressée, plutôt que par des considérations d’argent.

6. Surprenez-les

L’ennui est le pire ennemi des créatifs ! Il leur faut du mouvement en permanence, même si cela peut paraître contre-productif. Ils changent par exemple d’itinéraire tous les matins pour se rendre au bureau, au risque de se perdre. Ils ne commandent jamais la même chose au restaurant, même si un plat leur a particulièrement plu… Ils cultivent ainsi le paradoxe parce que leur esprit est complexe. Leur credo serait sans doute plutôt :

pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ?

Au lieu de chercher une solution à un problème, ils préfèrent en chercher des dizaines. L’essentiel est donc de les maintenir dans un environnement jalonné de surprises et d’imprévus, et de les laisser s’épanouir dans leur propre chaos.

7. Mettez-les sur un piédestal

Comme l’avait souligné le poète et dramaturge T.S. Eliot : « Une grande partie des problèmes de ce monde est due aux gens qui veulent se sentir importants. » Et l’ennui, c’est que les autres ne savent pas (ou ne veulent pas) les considérer comme tels. Nous ne sommes pas tous appréciés de la même façon, car la notion de mérite entre en jeu.

Toute entreprise est faite de collaborateurs à fort et à faible potentiel. C’est aux managers compétents de savoir les identifier. Il est essentiel de savoir reconnaître les aptitudes créatives d’un collaborateur, ou vous risquez de le voir partir ailleurs.

Une dernière remarque…

Evitez de laisser vos créatifs manager d’autres personnes. Les vrais inventeurs font rarement de bons managers ! Leur profil est en effet très différent. Steve Jobs entretenait de meilleures relations avec les gadgets qu’avec les êtres humains. Et la plupart des ingénieurs de Google ne s’intéressent absolument pas aux questions de management. Si les start-ups ont tendance aujourd’hui à vite stagner, c’est parce que leurs fondateurs restent à la tête de la direction. Elles feraient mieux de suivre l’exemple de Mark Zuckerberg qui a fait venir Sheryl Sandberg pour compenser ses lacunes en matière de leadership.

Les recherches confirment le profil stéréotypé de l’innovateur, il présente en effet des particularités psychiques qui l’empêchent de devenir un bon leader : rebelle, antisocial, égocentrique et peu enclin à se soucier des autres. Sachez le manager comme il faut et ses créations feront le bonheur de tout le monde.

Article de Tomas Chamorro-Premuzic, Professeur de Psychologie du Travail à l’UCL, University College de Londres et co-fondateur de Metaprofiling.com
Source : Harvard Business Review