De l’impact des biais cognitifs dans les décisions managériales.
En situation d’urgence, il est fréquent de voir des décisions prises vite, mal et contredites ensuite par de nouveaux éléments. Pourquoi est-il si difficile de décider en situation d’urgence pour un manager ou un dirigeant ? Sans doute parce qu’ils font face à trois paramètres que sont l’urgence, l’émotion et l’incertitude.
Mais aussi sans doute parce que sous stress notre beau cerveau humain est capable de la pire des trahisons… il est victime de biais, dits cognitifs.
Qu’est-ce qu’un biais cognitif ?
Les biais cognitifs ont été mis en évidence en 1972, par les psychologues Daniel Kahneman et Amos Tversky. Ils ont démontré de manière systématique que la prise de décision ne s’appuie que partiellement sur la pensée rationnelle et le raisonnement.
Ils remettent en question la théorie du choix rationnel.
En pratique, un biais cognitif est une routine (facilité) de raisonnement, de jugement, ou de perception, qui amène une personne ou un groupe, à prendre la mauvaise décision dans certains contextes. Il s’agit d’une erreur du traitement de l’information.
Les biais sont relativement stables (nous faisons les mêmes erreurs régulièrement), inconscients, et présents dans de nombreux domaines comme la médecine, le management, les finances, … et la gestion des risques !
Les biais sont nombreux et nous en avons retenu certains et les avons classés en 3 catégories1 : les biais liés au temps, aux acteurs et aux groupes, et à l’événement.
Dans ce premier papier, je vous propose une analyse des biais cognitifs liés au temps.
(1 – Pour en savoir plus sur les biais cognitifs : « Choices, Values and Frame », de Daniel Kahneman, ou « C’est vraiment moi qui décide ? » de Dan Ariely.)
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3 biais liés au temps
Pour commencer le biais rétrospectif. Il s’agit d’une erreur de raisonnement consistant à estimer, a posteriori, qu’un événement était probable ou prévisible, alors qu’il ne l’était pas a priori sur la base des informations alors disponibles. Le biais rétrospectif ramène dans le passé des éléments non disponibles alors et apparus après.
Conséquence : le biais rétrospectif sera source de critiques de la part des publics témoins des décisions des dirigeants mais ne seront pas présents au moment de la prise de décision. Il faut donc assumer cette prise de décision et savoir expliquer en quoi une autre option n’était pas possible à ce moment-là.
Un exemple de ce biais ? les reproches faits à Roselyne Bachelot (2009) au sujet de son achat de millions de vaccins, alors que c’est après la commande qu’on a eu toutes les informations sur la séroconversion des personnes vaccinés et la durée de la protection !!!
Le biais de récence consiste à traiter comme prioritaires les informations arrivées en dernier et à négliger de ce fait le contexte général, les premières informations.
Conséquence : ce biais a pour conséquence de voir d’anticiper une fin de crise, de négliger les effets rebonds potentiels, et les autres paramètres émotionnels.
Par exemple : en situation de crise sanitaire, on considère une crise comme gérée ou terminée sur la base de premiers résultats favorables de tests.
Le biais de primauté au contraire consiste à accorder plus d’importance à la première information reçue au sujet d’un événement, à évaluer la situation à partir de ce premier élément et négliger ceux reçus ultérieurement.
Il est aussi le résultat d’une première évaluation de la situation, qui ne peut pas être contredite ensuite.
Conséquence : le biais de primauté invite à se focaliser sur un premier élément déclencheur et à négliger ensuite l’évolution de la situation.
Par exemple : C’est la personne qui a des douleurs abdominales. Puis un peu de fièvre, mais reste sur les douleurs prises comme des courbatures sans voir que globalement… son état se dégrade vers quelque chose de plus grave.
Comment décider en situation d’urgence ?
En situation d’urgence, les décisions managériales sont difficiles à prendre. Nous doutons légitimement de la pertinence de chaque choix. Déculpabilisons ! En gardant en tête que manager, c’est discerner dans la complexité, décider dans l’incertitude et agir dans l’adversité !
Une fois cela établi, les décisions seront prises sur la base d’informations disponibles, et d’hypothèses scénariques. 3 hypothèses ! La meilleure des options, la plus probable, et la pire des issues. La règle devient alors : prendre la décision, dont la pire conséquence est la mieux assumée !